Les nombres ont une importance capitale au sein des disciplines scientifiques. Des notions telles que l’incidence d’un phénomène au sein d’une population ou le calcul des risques associés à un comportement se fondent sur l’analyse de données quantitatives.
Les experts et les professionnels qui songent à démarrer une campagne de publicité sociale sont souvent issus d’un milieu scolarisé. Ils utilisent sans problème des données chiffrées et sont souvent familiers avec certaines notions statistiques.
Malheureusement, une grande partie de la population ne possède même pas les compétences de base en matière de nombres nous disent Reyna et ses collaborateurs (2009). On parle alors d’une faible numératie. Pour ce groupe, la présentation de fractions, de statistiques, la comparaison de données numériques ou de probabilités pose un problème important.
Hawley et ses collaborateurs ont montré, dans un article publié dans le Patient Education and Counseling, que les pictogrammes étaient un moyen approprié permettant de parler de risque à des personnes possédant une plus faible numéracie.
Des faits irréfutables ?
Les experts qui ont été formés à l’analyse statistique ont souvent tendance à croire que la démonstration numérique produit le même impact chez les citoyens que sur eux. C’est une hypothèse non fondée. De Wit et ses collaborateurs se sont posés la question : « Qu’est-ce qui fonctionne le mieux : des statistiques objectives ou un témoignage personnel ? ». Ils ont observé que le témoignage personnel était plus efficace pour amener les personnes à intégrer la perception de risques individuels (une étape nécessaire à tout changement de comportement). Leur analyse démontre que lorsqu’un discours sur le risque utilise des statistiques, il semble plus persuasif aux personnes déjà convaincues de la cause qu’aux personnes dont on contredit les valeurs (par exemple, une publicité exposant les risques de cancer liés au tabac sera considérée plus persuasive par des non-fumeurs que des fumeurs). En évitant de heurter les croyances personnelles, le témoignage aurait donc une puissance persuasive plus grande suggèrent les chercheurs.
Si vous souhaitez utiliser les statistiques ou les nombres pour convaincre les personnes exposées de la sévérité ou de la réalité d’un risque, considérez ce que disent Slovic et ses collaborateurs (2005) : « Hendrickx, Vlek, and Oppewal (1989) found that warnings were more effective when, rather than being presented in terms of relative frequencies of harm, they were presented in the form of vivid, affect-laden scenarios and anecdotes. How information is presented to patients and other decision makers may have a large impact on how they respond to risks and benefits »(p.S38)
Avec une pointe d’ironie, ces chercheurs commentent l’approche populaire au cours des dernières décennies en prévention du tabagisme « For many years, beginning smokers were portrayed as “young economists,” rationally weighing the risks of smoking against the benefits when deciding whether to initiate that activity” » (S39). L’argument est difficile à réfuter. Nous avons été confrontés à un choix où différents arguments étaient comparés pour faciliter notre décision dans l’achat d’une automobile, d’un gadget, de vacances, etc. Et nous avons probablement tous des illustrations montrant que les décisions individuelles tiennent souvent à l’émotif et à l’irrationnel.
Dans des décisions touchant des habitudes de vie ou des comportements individuels (vaccination, consommation de tabac, alimentation, …), l’efficacité d’une argumentation strictement logique, quantifiée, raisonnable est souvent douteuse.
Exemples de campagnes utilisant des statistiques et des nombres :
Sources mentionnées
Hawley, S. T., Zikmund-Fisher, B., Ubel, P., Jancovic, A., Lucas, T., & Fagerlin, A. (2008). The impact of the format of graphical presentation on health-related knowledge and treatment choices. Patient Education and Counseling, 73(3), 448-455.
Reyna, V. F., Nelson, W. L., Han, P. K., & Dieckmann, N. F. (2009). How Numeracy Influences Risk Comprehension and Medical Decision Making. Psychological Bulletin, 135(6), 943-973
Slovic, P., Peters, E., Finucane, M. L., & Macgregor, D. G. (2005). Affect, Risk, and Decision Making. Health Psychology, 24(4 Suppl), S35-40.