Déterminants de l’adoption d’un comportement : le mix marketing
1. Le produit, le comportement comme tel
2. Le prix, ce que « coûte » ce comportement
3. L’accessibilité, l’accès à ce qui est nécessaire pour ce comportement
4. La promotion, la perception du comportement à partir de ce qui est vu ou entendu
Le marketing est davantage une approche qu’un modèle théorique du changement de comportement. Mais on peut aussi y puiser des fondements théoriques guidant les campagnes sociales, ce qui justifie que le sujet est abordé comme tel, sur pubsociale.com. Pour les puristes, je signale la coexistence de plusieurs visions « orthodoxes » et « non-orthodoxes » du marketing social, le concept faisant fait l’objet de multiples définitions (Grier et Bryant,2002).
L’approche emprunte au marketing commercial, démarche où un promoteur cherche à « vendre » certains biens ou services afin de générer des profits. Dans le cas du marketing social, on propose plutôt des comportements, et les bénéfices pour le promoteur sont indirects. Essentiellement, 4 composantes importantes doivent être considérées pour obtenir l’adhésion des personnes ciblées aux changements. Il s’agit du « mix marketing »:
La nature du comportement proposé (le
produit), qui doit répondre à un besoin ou offrir une solution qui
intéressera les personnes ciblées
Le coût exigé des personnes qui adopteront le comportement (le prix). Toujours envisagé du point de
vue de la personne ciblée, le coût correspond à ce qui sera sacrifié, aux
pertes, aux inconvénients, à l’inconfort ou l’incertitude.
L’accessibilité (la place). On parle
alors de la diffusion, de l’accès aux éléments nécessaires pour actualiser le
comportement. Par exemple, pour faire de la bicyclette, il est nécessaire
d’avoir accès à un vélo.
La publicité qui sert à informer et promouvoir (la promotion) le public ciblé. C’est la publicité comme telle (qui
n’est qu’une des composantes du marketing, mais qui monopolise souvent –
parfois complétement - les efforts de ceux qui font des campagnes sociales). Outre
la publicité, la promotion englobe différentes activités, telles que les
relations publiques, la communication imprimée, la diffusion d’objets
promotionnels, la vente, la promotion par des visiteurs (ou des représentants),
le placement dans les médias, etc. En pratique, les spécialistes d’une technique
promotionnelle ont généralement tendance à suggérer l’utilisation de cette
approche au promoteur... un paradoxe justifiant que le promoteur possède une
compétence minimale en marketing qui lui permet de pondérer et d’orienter ses
activités promotionnelles où les publicitaires, les relationnistes, les
spécialistes des ventes peuvent souvent – sous la gouverne du client -
travailler en synergie et pas en compétition. Confier à une firme de
relationnistes la promotion, ou à un groupe de publicitaires les relations
publiques, soulève inévitablement des questions.
Le mix marketing est résumé dans le schéma suivant.
Les principes du marketing social, connus et répétés dan la plupart des manuels traitant de communication persuasive, sont pourtant rarement utilisés dans les campagnes de prévention (Vega et Roland, 2005). Pourtant, le marketing social offre une réflexion intéressante aux promoteurs de campagnes sociales, qu’ils souhaitent ou non emprunter cette approche.
L’apport remarquable du marketing à la publicité sociale tient à sa prémisse de départ, très souvent absente des considérations des promoteurs de campagnes de prévention: il est essentiel de tenir compte du public ciblé lorsqu’on fait une campagne.
Plutôt que d’espérer imposer arbitrairement son idée à une population passive à persuader, le marketing social postule que la communication persuasive est un échange dynamique entre deux parties, que chaque partie possède une chose que l’autre partie souhaite, que chacune peut communiquer et offrir, que chacune est libre d’accepter ou de refuser, et que – s’il y a bénéfice mutuel possible – chaque parie considère approprié d’échanger avec l’autre. C’est la vision théorique du marketing perçu comme un échange, fondée sur la prémisse que nous avons tous des besoins et qyue nous souhaitons tous améliorer notre situation. (Hastings et Sarens, 2003).
UTILITÉ POUR UNE CAMPAGNE SOCIALE
Le marketing social ne peut être simplement réduit à un livre de recettes. C’est une philosophie, une approche, une façon de voir et de décider.
Au centre de l’approche, le promoteur doit considérer qu’il doit répondre aux besoins de membres de la société. L’approche paternaliste, la vision du bon samaritain qui aide les personnes peu éduquées, l’intention correctrice voulant redresser les comportements déviants… ces prémisses n’ont pas leur place ici.
Doté d’une bonne connaissance du public à influencer, le promoteur de campagnes doit identifier les besoins qui lui offrent l’occasion de promouvoir le comportement qu’il veut faire adopte. Ce comportement doit aussi être considéré lucidement, à partir du point de vue de la personne à qui on souhaite le faire adopter : ce qui semble aisé à un professionnel de la santé ayant un revenu régulier et une scolarité importante pourrait sembler différent à une personne ayant un profil très différent. Le « prix » à payer n’est pas universel, et c’est la perception de la cible qui compte. Le comportement est-il accessible ? Les personnes peuvent-elles se procurer le condom, obtenir la vaccination, utiliser le matériel sportif annoncé ? Faites-vous la promotion d’un comportement auprès d’un groupe qui n’y a pas accès ? C’est la composante « place » du marketing. Et, finalement, quelles seront vos choix de promotion. Le budget vous permet-il d’investir en publicité ? À quels véhicules publicitaires vos cibles sont-elles exposées ? Quelle est la crédibilité des publicités faites sur le même sujet par ce promoteur ou un autre ?
Il n’y a pas de solution magique dans ce « mix marketing » ou le dosage de chaque ingrédient peu varier. Et la seule recette, c’est de ne jamais oublier que vos actions constituent une relation où vous et vos cibles menez un « échange » qui doit être perçu comme mutuellement profitable.
Grier, S., et Bryant, C. A. (2005). Social marketing in public health. Annual Review of Public Health, 26, 319-339
Hastings, G., et Saren, M. (2003). The critical contribution of social marketing. Marketing Theory, 3(3), 305-322
Vega, M. Y., et Roland, E. L. (2005). Social marketing techniques for public health communication: A review of syphilis awareness campaigns in 8 us cities. Sexually Transmitted Diseases, 32(10 Suppl), S30-36